Les robots investissent le bloc opératoire


Lors d’une intervention pratiquée à l’aide du robot Da Vinci Xi, sur une patiente atteinte d’un cancer du vagin et de la vulve, à l’Institut régional du cancer de Montpellier, le 1ᵉʳ décembre 2020.

Michel Lefranc n’a pas encore terminé de recoudre sa patiente qu’il sait déjà que son intervention est un « succès » et que cette femme, entrée le matin, pourra sortir de l’hôpital en fin de journée. Neurochirurgien au CHU d’Amiens, il vient de réaliser une opération un peu spéciale qui vise à traiter des douleurs isolées du bas du dos. Depuis trois ans, il n’utilise plus de vis pour traiter ce type de douleur. Grâce au robot, il va brûler les petites terminaisons nerveuses de l’articulation (rhizolyse) et détruire son cartilage, permettant une fusion osseuse (arthrodèse). Sans Rosa, un robot développé en collaboration avec l’ingénieur Bertin Nahum et sa société d’alors, Medtech, il n’y parviendrait pas.

Le chirurgien amiénois a planifié toute l’intervention dans les moindres détails grâce à la création d’un jumeau numérique de la patiente. Une fois au bloc, image et patiente ne font plus qu’un. « Il suffit d’apprendre au robot où il se trouve dans l’espace et où est le malade, explique Michel Lefranc, pendant qu’il fixe un instrument au bout du bras du robot. Puis la machine se positionne exactement là où je dois intervenir, au millimètre près. » Des écrans lui permettent de tout contrôler.

La robotique chirurgicale, ce chirurgien d’une quarantaine d’années est tombé dedans dès son internat à Amiens. Chirurgie du rachis, mise en place d’implants dans le cerveau de patients atteints de la maladie de Parkinson… il réalise 95 % de ses opérations avec Rosa.

Au sein de son hôpital, il a contribué à fonder un groupement de recherches et d’études en chirurgie robotisée (Greco), pour développer la robotique. Implant cérébral, opération d’une scoliose grave et évolutive chez un enfant de 6 ans, pose d’un implant cochléaire chez un patient atteint de surdité… les équipes du Greco créé par l’université de Picardie conjointement avec le CHU d’Amiens-Picardie ont déjà réalisé neuf premières mondiales entre 2017 et 2022. En décembre 2022, c’est une prothèse de genou qui a été posée grâce au robot Mako, de la société Smart Robotics.

Les urologues ont ouvert la voie

Rosa, Mako, Hugo, Da Vinci… les robots ont révolutionné en quelques années la pratique des chirurgiens. Ils investissent les blocs opératoires. Lors d’un congrès organisé par l’Académie nationale de chirurgie, début décembre 2023, il en a été beaucoup question. Mais, qu’on ne s’y trompe pas, ce ne sont pas les robots qui opèrent, c’est le chirurgien qui les manipule.

Dans cette course à l’innovation, le robot Da Vinci de l’américain Intuitive Surgical, dont les bras articulés le font ressembler à une pieuvre géante, a pris une longueur d’avance dans ce que l’on appelle la chirurgie des tissus mous. Dans les années 1980, le Pentagone avait missionné plusieurs institutions, dont la NASA, pour trouver de nouvelles solutions chirurgicales afin de pouvoir soigner à distance les blessés sur le champ de bataille. Issu de ces recherches, le Da Vinci a finalement atterri dans le bloc opératoire au début des années 2000. L’objectif était la chirurgie cardiaque, notamment les pontages coronariens. Mais ce sont les urologues qui se sont emparés de ce nouvel outil pour les opérations du cancer de la prostate ou du rein, car il permet d’atteindre des zones anatomiques difficiles d’accès. Pas étonnant : ces mêmes spécialistes avaient aussi été parmi les premiers à adopter la chirurgie mini-invasive par cœlioscopie (ou laparoscopie).

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